I- MALADIE DE LONGUE DUREE, ABSENCES REPETEES ET LICENCIEMENT
Principe :
Il est interdit de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap.
Exception :
Toutefois, l’absence pour maladie de longue durée ou les absences répétées pour maladie d’un salarié peuvent amener un employeur à envisager de licencier le salarié pour le bon fonctionnement de l’entreprise et parce qu’il se trouve dans la nécessité de le remplacer définitivement.
Conditions cumulatives de l’exception :
1- Perturbation du fonctionnement de l’entreprise :
Pour vérifier la perturbation du fonctionnement de l’entreprise, sont pris en compte :
- la qualification professionnelle et l’emploi occupé du salarié ;
La Cour de Cassation considère qu’un salarié, dépourvu de toute qualification ou ayant une qualification peu élevée, peut être aisément remplacé éventuellement en ayant recours à l’intérim. - la taille de l’entreprise ;
La nécessité de remplacer un salarié absent pour maladie peut se ressentir plus rapidement si l’entreprise a un effectif réduit et si les délais d’exécution des travaux impératifs sont courts. - la nature de l’activité de l’entreprise ;
- la situation géographique de l’entreprise.
Il peut être difficile, en raison de la situation géographique, de remplacer le salarié absent par un salarié en contrat à durée déterminée ou par un intérimaire.
Attention : l’employeur ne saurait se précipiter avant d’envisager un licenciement. Un tel licenciement ne peut être envisagé qu’après une durée d’absence de plusieurs mois.
2- Nécessité de remplacer le salarié de façon définitive :
Cette nécessité peut être justifiée soit par :
- la réitération des absences (qui correspond à un véritable absentéisme) ;
- une prolongation de la maladie qui tend à devenir un état permanent.
Le remplacement définitif doit avoir lieu dans un délai raisonnable après le licenciement du salarié malade.
Attention : la charge de la preuve du remplacement définitif du salarié licencié dans un délai raisonnable pèse sur l’employeur.
A titre d’exemple, la Cour de cassation a considéré qu’il n’y avait pas nécessité de remplacement définitif du salarié dans les cas suivants :
- lorsque les autres employés de l’entreprise effectuent des heures supplémentaires pour remplacer le salarié absent (Cass. soc. 13 mars 2001, N°99.40-110) ;
- lorsqu’un intérimaire est embauché pour remplacer le salarié pendant son absence (Ccas soc. 13 mars 2001, N°99.40-110) ;
- lorsque le salarié absent est remplacé par un salarié de l’entreprise via une promotion interne puis par l’embauche d’une personne en contrat à durée déterminée (Cass. soc. 20 fév. 2008, N°06-44.712) ;
- le salarié absent est remplacé par un salarié en contrat à durée déterminée (Cass. Soc. 2 mars 2005 N°03-42.800) ;
- le salarié absent est remplacé par un autre salarié de l’entreprise (Cass. Soc. 10 mai 2006, n°04-45.500).
Licenciement :
Si l’employeur justifie que :
- le fonctionnement de l’entreprise est perturbé par l’absence du salarié (Cass soc. 13 mars 2001, N°99.40-110 – Cass Soc. 21 sept. 2005, n°03-45.820),
- et que le remplacement définitif du salarié doit être envisagé,
alors il peut entamer une procédure de licenciement du salarié absent pour maladie.
Attention :
Le motif du licenciement ne peut jamais être la maladie du salarié mais uniquement le disfonctionnement, occasionné par son absence.
La procédure de licenciement doit être respectée (convocation, entretien, lettre de licenciement, indemnités de licenciement, remise des documents de rupture CF. fiche relative au licenciement).
Indemnités de préavis :
Le salarié empêché de travailler par la maladie n’a pas droit à l’indemnité légale compensatrice de préavis.
Si le préavis se déroule pendant un arrêt de travail donnant droit à des indemnités complémentaires de maladie à la charge de l’employeur, ces indemnités sont versées jusqu’à la fin de la période d’indemnisation en cours (soit la totalité du préavis si l’arrêt maladie se termine à la fin ou après le préavis, soit pendant une partie du préavis si l’arrêt maladie se termine pendant le préavis). Si l’arrêt maladie se termine avant la fin du préavis, le salarié peut prétendre à une indemnisation partielle de son préavis pour la période de préavis restant à courir où il devient apte à travailler.
En revanche, si l’employeur dispense le salarié d’effectuer le préavis, il est tenu au paiement de l’indemnité compensatrice de préavis.
II- INAPTITUDE PHYSIQUE RELEVANT D’UNE DECISION DU MEDECIN DU TRAVAIL
L’inaptitude physique, c’est l’incapacité à remplir le contrat de travail. Le salarié n’est plus apte physiquement à assumer les fonctions de son emploi.
Trois catégories d’inaptitude
- Inaptitude partielle :
Le salarié est capable d’accomplir une partie des tâches de son poste de travail ;
- Inaptitude totale :
Le salarié ne peut plus accomplir aucune des tâches correspondant à son poste de travail mais reste capable de tenir un emploi différent ;
- Inaptitude absolue :
Le salarié ne peut plus accomplir un quelconque travail.
L’inaptitude est établie lors de la visite de reprise par le médecin du travail, seul compétent pour prononcer une inaptitude, qui a lieu à l’issue d’un arrêt de travail pour maladie ou accident.
Le médecin du travail donne dans la constatation d’inaptitude d’éventuelles possibilités de reclassement du salarié, si tel n’est pas le cas, l’employeur à tout intérêt à les solliciter auprès de ce médecin.
L’inaptitude s’apprécie par rapport au poste occupé précédemment par le salarié.
Attention : la notion d’inaptitude est différente et indépendante des notions d’incapacité et d’invalidité de la sécurité Sociale.
Obligations de l’employeur
Lorsque le médecin du travail constate une des trois inaptitudes, l’employeur a l’obligation de reclasser le salarié dans le mois qui suit la constatation médicale d’inaptitude.
Si aucun reclassement n’est envisageable, l’employeur peut éventuellement licencier le salarié inapte.
Si l’employeur n’a ni reclassé, ni licencié le salarié inapte à l’expiration du délai d’un mois, l’employeur doit verser à nouveau le salaire à son salarié (article L.1226-2 à 1226-4 du Code du travail).
Procédure de constatation de l’inaptitude
Seul le médecin du travail peut constater l’inaptitude d’un salarié soit :
- dans le cadre de la surveillance médicale ;
- dans le cadre de la visite médicale de reprise.
En l’absence de cette constatation, le licenciement fondé sur l’inaptitude du salarié est nul.
Si le salarié ne réclame pas sa réintégration, il a droit à des indemnités de rupture et à des indemnités de réparation du préjudice résultant du caractère illicite du licenciement au moins égales à celles de l’article L.1235 du Code du travail, soit au moins l’équivalent des 6 derniers mois de salaire.
1- visite médicale de pré-reprise :
Cette visite a lieu pendant l’arrêt de travail à l’initiative du salarié, du médecin traitant ou du médecin conseil des organismes de sécurité sociale dans le but de faciliter la recherche de mesures nécessaires au reclassement lorsqu’une modification de l’aptitude du salarié au travail est prévisible. Le but est de faciliter la recherche de reclassement. Elle ne met pas fin à la période de suspension du contrat de travail.
L’avis du médecin du travail est sollicité à nouveau lors de la reprise de l’activité professionnelle.
La visite de pré-reprise ne dispense pas l’employeur de son obligation d’organiser une visite de reprise lorsque cette dernière est obligatoire.
2- visite médicale de reprise :
a- circonstances de la visite :
Cette visite est obligatoire pour toute absence pour maladie ou accident non professionnel d’au moins 21 jours et en cas d’absences répétées pour raison de santé.
b- qui doit l’organiser ?
Il appartient à l’employeur d’organiser cette visite.
c- date de la visite :
La visite doit avoir lieu lors de la reprise du travail et au plus tard dans un délai de 8 jours après la reprise du travail.
d- Procédure :
L’inaptitude ne peut être prononcée qu’après deux examens médicaux par le médecin du travail espacés de deux semaines article R.4624-31 et R.4624-32 du Code du travail.
Le délai de deux semaines court à partir de la date du 1er examen. C’est un délai minimum.
Le 2ème examen est également à l’initiative de l’employeur.
Si le licenciement est prononcé avant le 2ème examen ou si le délai de deux semaines minimum n’est pas respecté, le licenciement est nul.
Exception :
Il n’y a pas de 2ème examen si à l’issue du 1er examen, le médecin du travail :
- constate un danger immédiat dans l’avis d’inaptitude ;
- le médecin du travail stipule qu’un deuxième examen n’est pas nécessaire.
e- conséquences de la visite :
Fin de la suspension du contrat de travail :
La première visite de reprise met fin à la suspension du contrat de travail. Le salarié perçoit à nouveau une rémunération.
Constatation de l’inaptitude :
L’inaptitude est constatée à l’issue du 2ème examen.
A l’issue du 2ème examen, l’employeur doit chercher à reclasser le salarié.
Si le salarié est déclaré inapte à l’issue de la visite de reprise, il n’est plus tenu de se présenter sur son lieu de travail. Si l’inaptitude est absolue et que le salarié ne se présente pas à son lieu de travail, son absence ne peut pas être considérée comme une faute.
Contestation de l’inaptitude :
L’avis du médecin du travail peut être contesté par le salarié ou l’employeur par saisine de l’inspecteur du travail article L. 4624-1 et R.4721-5 du Code du travail.
La saisine ne suspend pas le délai d’un mois pendant lequel l’employeur doit tout faire pour reclasser le salarié, et si cela n’est pas possible, il doit le licencier ou au moins avoir débuté la procédure de licenciement pendant ce délai.
Reclassement obligatoire si inaptitude (article L.1226-2 du Code du travail)
Lorsque le salarié est déclaré inapte, l’employeur doit tout faire pour le reclasser à un autre emploi approprié à ses capacités et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutation, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail.
Le contrat de travail peut être suspendu pour suivre un stage de reclassement professionnel.
- Procédure de reclassement :
L’offre de reclassement doit être sérieuse et précise dans un emploi compatible avec les capacités réduites du salarié et les conclusions du médecin du travail.
Elle doit préciser si possible :
- l’effectif de l’entreprise,
- la nature des postes existants dans l’entreprise,
- les possibilités de mutation ou de transformation du poste de travail.
En raison de la rédaction actuelle de la convention collective, il est fortement conseillé d’étendre la procédure de reclassement aux autres structures d’hébergement étudiants appliquant la convention collective des maisons d’étudiants avec l’accord écrit du salarié concerné et si possible la situation géographique qu’il souhaite.
L’employeur doit alors demander aux établissements concernés les possibilités de poste par écrit. Si les établissements n’ont pas de poste à pourvoir, ils doivent envoyer un courrier indiquant qu’il n’y a pas de postes.
Attention :
- L’obligation de reclassement n’oblige pas un employeur à muter un autre salarié afin de libérer un poste pour le salarié inapte (cass.soc. 15/11/2006, n°05-40.408).
La mutation peut uniquement se faire parmi les emplois disponibles dans l’entreprise. - L’employeur ne peut être tenu d’imposer à un autre salarié une modification de son contrat de travail afin de libérer son poste pour le proposer en reclassement à un salarié déclaré inapte.
- Ne répond pas à son obligation l’employeur qui licencie un salarié inapte à l’exercice d’un emploi à temps complet mais apte à mi-temps dès lors qu’il n’apporte pas la preuve de son impossibilité de prendre en considération les propositions de l’inspecteur du travail, un autre salarié ayant à la même époque sollicité un emploi à mi-temps.
- Délai d’un mois pour reclasser :
L’inaptitude est reconnue après les 2 examens séparés de deux semaines au minimum.
Le délai d’un mois commence à courir à compter de la date du second examen (circ. DRT n°93-11 du 17 mars 1993).
Pendant ce délai d’un mois, le salarié ne perçoit pas de rémunération.
- Issue du reclassement :
Le salarié est reclassé :
Si le salarié est reclassé à un poste inférieur, l’employeur n’est pas tenu de maintenir la rémunération antérieure qui ne correspond plus aux nouvelles fonctions. Toutefois, s’il s’agit d’une modification du contrat de travail qui doit faire l’objet de la signature d’un avenant au contrat de travail. Le salarié est en droit de refuser cette modification.
Si un poste est possible pour le reclassement mais qu’il reste des doutes quant aux capacités du salarié, l’employeur doit contacter le médecin du travail pour avis.
Le salarié refuse le reclassement :
Si le salarié refuse le reclassement, il est alors licencié.
Il n’y a pas de reclassement possible :
Lorsque l’employeur ne peut pas reclasser le salarié, il doit le prouver et l’indiquer dans la lettre de convocation à l’entretien préalable et dans la lettre de licenciement.
Si impossibilité de reclasser le salarié inapte alors un licenciement peut être envisagé
Si le reclassement n’est pas possible ou si le salarié refuse le reclassement, il peut être licencié.
Le licenciement éventuel doit intervenir dans le délai d’un mois à partir de la constatation d’inaptitude et lorsque le reclassement n’est pas possible. A défaut, l’employeur est tenu de verser à nouveau les salaires.
La procédure de licenciement doit être respectée.
Le préavis doit être respecté cependant l’indemnité compensatrice de préavis ne sera pas due dans la mesure où le salarié n’est pas apte à occuper l’emploi qu’il exerçait antérieurement.
Le contrat de travail prend fin avec le préavis même s’il ne peut être exécuté. Cela permet de déterminer la date à partir de laquelle le salarié a droit aux allocations de chômage et celle retenue pour le calcul de l’ancienneté.
Les indemnités légales et/ou conventionnelles de fin de contrat sont dues, notamment l’indemnité de licenciement et l’indemnité de congés payés pour les congés payés acquis non pris que la période de prise des congés payés soit close ou non (Ccas. Soc.24/02/2009, n°07-44488).
En principe, si le salarié ne peut pas travailler, il ne peut donc pas effectuer de préavis. Dans ce cas, l’indemnité de préavis n’est pas due.
Cependant, l’indemnité de préavis est due lorsque :
- Le salarié est inapte à la suite d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle ;
- l’inaptitude du salarié est due au comportement fautif de l’employeur (Cass. SOC. 20/09/2006, n°05-41.385) ;
- un salarié est licencié sans que l’employeur respecte son obligation de reclassement consécutive à une inaptitude (cass. Soc. 26/11/2002, n°00-41.633) ;
- un salarié travailleur handicapé a été embauché sans être soumis à la visite médicale d’embauche (ccas. Soc. 10/07/2002, n°00-41.238).